Gérard Neyrand

Sociologue

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L’amour individualiste.

Comment le couple peut-il survivre ?

érès, 2018.

Dans notre société néolibérale où l’individu est premier, le rapport au partenaire conjugal reste fondamental mais traversé par tous les paradoxes de la modernité. L’amour est devenu son principe exclusif mais aussi le support de sa fragilité, à l’heure où il s’agit avant tout de se réaliser soi-même dans le rapport aux autres. Le partenaire est ainsi considéré comme le principal instrument de l’épanouissement personnel et les attentes, conscientes et inconscientes, à son égard sont énormes. A tel point que les séparations sont devenues chose banale et les replis sur soi des plus fréquents. Face à la violence de cette norme de réalisation conjugale, les tentatives de préserver l’idéal du couple prolifèrent, que ce soit dans la succession des conjugalités, l’ouverture du couple à une sexualité partagée (échangisme, polyamour), la non-cohabitation conjugale, la profusion des rencontres internet ou le mariage homosexuel. Partout le couple est réaffirmé en même temps que ses expressions concrètes se diversifient autant qu’elles se fragilisent, et l’inquiétude conjugale s’est généralisée. Eminemment personnel en apparence, le désir de faire couple engage pourtant un imaginaire social dans lequel se reflète la force des déterminations collectives. On y voit se croiser le besoin social de fixer un cadre au désir d’enfant et de vie familiale et la traduction psychique de ce besoin dans la reviviscence sur la figure du conjoint des attachements parentaux primaires. En ce sens, le couple rejoue à la fois quelque chose de la problématique relationnelle et affective de la petite enfance vécue par chaque sujet et de l'enracinement social des relations privées dans un ordre familial articulé à toutes les dimensions de la vie en société. C’est la raison pour laquelle, malgré les prophètes de sa disparition prochaine, il continue à représenter pour les membres de nos sociétés démocratiques et marchandes une valeur centrale et un objectif généralisé, tout autant que le lieu de multiples désillusions et remises en question.

Ce livre explore les différentes formules de cette reconfiguration conjugale en pointant les multiples paradoxes auxquels le couple est aujourd’hui confronté, et le dilemme qui s’en dégage : s’il convient pour de multiples raisons d’être en couple, quelle formule s’agit-il pour chacun d’adopter ?


SOMMAIRE

Introduction : De l'institution conjugale à la norme de la vie en couple
I - LE CONTEXTE SOCIO-HISTORIQUE D'UNE MUTATION DU CONJUGAL
Les étapes du passage à la néo-conjugalité contemporaine
La mise en tension des fonctions du couple
Conjugal et parental, deux logiques qui se délient II. LIEN CONJUGAL ET LIEN SOCIAL
Démocratie et marché, le double support de la promotion de l’individu La conjugalité en péril
L’idéal amoureux, nouveau ciment du couple
III. MUTATION DU COUPLE ET NOUVEL ORDRE FAMILIA
L Retour sur la genèse de la conjugalité moderne
Une conjugalité recentrée sur les individus
Répercussions du modèle conjugal fusionnel après séparation
La tendance à une "démocratisation" des relations post-séparation
Une sédimentation de logiques relationnelles
Vers une égalité parentale... dans la différenciation sociale ?
IV. RENOUVELLEMENT DES FAÇONS DE FAIRE ET DE DÉFAIRE COUPLE
Se rencontrer à l'ère d'Internet
Les effets paradoxaux du dispositif interactif
Affronter les affres de la séparation
V. NORME CONJUGALE ET CONJUGALITÉS PLURIELLES
Le règne de la norme conjugale
La norme confrontée à ses contradictions
Consentir ou le retour de l’asymétrie
L’épreuve de la durée
Les multiples façons de composer avec la norme
De la conjugalité homosexuelle à l’homoparentalité, ou l’ébranlement des certitudes
VI. LE CONJUGAL ET L’IDENTITÉ
Le couple moderne, une problématique identitaire
La société civile au secours du couple
Conclusion

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